Rapport de prospective : Consommation – Changer la donne
Désormais, les consommateurs ne se limitent plus à simplement acheter un produit. Des modes de fabrication plus durables à l’essor de l’économie de l’expérience, voici comment nos habitudes évoluent.
Le Rapport de prospective de l’ISO met en lumière les tendances mondiales qui, dans de nombreux secteurs, orienteront la prise de décisions stratégiques pour un avenir meilleur. À partir de ces éléments de prospective, l’ISO examine certains des domaines potentiels de normalisation. Dans une série d’articles, nous analysons avec les meilleurs spécialistes quelques-unes de ces tendances mondiales critiques.
L’urgence de l’action climatique, la connectivité croissante, l’essor de la classe moyenne et bien d’autres tendances mondiales font évoluer nos habitudes de consommation. Aujourd’hui, nombre d’entre nous ne se contentent pas d’un produit répondant à leurs besoins, mais aspirent à des produits à la fois susceptibles d’améliorer leur vie et issus d’une production et de chaînes d’approvisionnement éthiques et plus respectueuses de l’environnement.
De plus en plus, la consommation ne se limite pas aux produits. Les consommateurs exigent des modes de fabrication plus durables sur le plan social et environnemental et recherchent désormais une « expérience » leur permettant de se sentir connectés au reste du monde. Une enquête menée récemment a ainsi révélé que 82 % des consommateurs américains souhaitent davantage d’interactions humaines lors de leurs transactions. Cette mutation des valeurs des consommateurs offre une occasion unique d’embrasser des modèles de production et de consommation plus durables.
De l’importance de l’étiquetage
J’ai discuté avec Graeme Drake, qui dirige le comité ISO chargé de l’étiquetage environnemental, de la manière dont les normes peuvent aider les consommateurs à identifier et à privilégier les bons produits. La norme ISO 14020, qui vient d’être révisée, est particulièrement utile à cet égard. Selon lui, « elle établit les règles actuelles définissant les modalités applicables à l’étiquetage des produits et les éléments à l’appui des allégations apposées sur les produits. Elle a pour objectif de protéger les consommateurs peu regardants des fausses allégations, le but ultime étant d’éviter l’écoblanchiment. »
Cette norme s’appuie sur une étude de marché approfondie sur l’étiquetage environnemental et de durabilité apposé sur les produits et propose un ensemble complet de principes et d’exigences générales aux fabricants, aux fournisseurs, aux autorités de régulation des marchés et aux consommateurs. L’ISO a commencé à développer des normes sur l’étiquetage environnemental à la suite du Sommet de la Terre de Rio de Janeiro, au début des années 1990. Aujourd’hui, cette série comprend huit normes, dont une en cours d’élaboration. La publication d’ISO 14020 est prévue d’ici la fin 2022.
Nous nous soucions plus que jamais des conséquences de nos choix sur l’environnement.
Consommer tout en respectant le climat
Nous nous soucions plus que jamais des conséquences de nos choix sur l’environnement. Ainsi, 65 % des consommateurs sont prêts à payer plus pour des produits et services plus responsables sur le plan écologique et social. La conjugaison d’une demande tournée vers la durabilité et d’une réglementation conforme aux objectifs nationaux et internationaux en la matière incite toujours plus d’entreprises à proposer des produits et services plus respectueux de l’environnement. Pour répondre à ces pressions, elles adoptent donc progressivement les principes de l’économie circulaire (à savoir une réduction des déchets et de la consommation de matières premières grâce notamment au recyclage), ainsi que certains éléments de l’économie du partage, des objectifs de décarbonation et d’autres stratégies.
Or une telle transition n’est pas une mince affaire. Ainsi, passer à une économie circulaire implique de revoir en profondeur les principes mêmes du fonctionnement des entreprises depuis les balbutiements de l’industrialisation. La mise en œuvre d’une production durable passe cependant par les Normes internationales. En effet, celles-ci jouent un rôle fondamental en aidant les entreprises à s’assurer que les changements qu’elles opèrent auront un réel impact sur l’environnement, tout en donnant aux consommateurs les outils leur permettant de distinguer les allégation véritablement « écologiques » de l’écoblanchiment, notamment grâce à des labels facilement identifiables.
Une « économie de l’expérience »
De plus en plus, les consommateurs disposant de suffisamment de moyens choisissent d’agir et d’avoir. L’essor de l’« économie de l’expérience » se traduit par la quête d’un sens plus profond chez les consommateurs, qui préfèrent, par exemple, dépenser leur revenu disponible dans certaines activités ou le tourisme d’aventure pour parvenir à une « forme d’accomplissement personnel ».
Cette tendance s’explique en partie par une numérisation accrue de la vie et du travail. Même si le consommateur n’a plus besoin de se rendre dans un magasin pour remplir son frigo, il peut choisir de le faire en raison de l’expérience vécue dans un environnement donné susceptible, par exemple, de contribuer à la création d’une communauté. Et parce que les consommateurs cherchent également des alternatives pour éviter un épuisement des ressources, l’économie de l’expérience résulte en partie des préoccupations liées à la durabilité.
La circularité est en passe de s’imposer comme la nouvelle normalité.
Des produits uniques
Du fait de la profusion d’offres disponibles dans le monde numérique, les consommateurs qui cherchent à se détourner du modèle « prendre-fabriquer-jeter » ont plus que jamais la possibilité d’acheter des produits personnalisables et parfaitement adaptés à leurs besoins en quelques clics. La numérisation dans le domaine des médias ou du divertissement a grandement contribué à l’essor des produits et services personnalisables.
La plupart des entreprises considèrent déjà cette personnalisation comme une priorité cherchent des alternatives à la production de masse traditionnelle. Cette évolution pourrait bouleverser le commerce mondial, car les entreprises sont contraintes de raccourcir leurs chaînes de valeur et de les rendre plus souples afin de fabriquer les produits au plus près de leur clientèle – une démarche également motivée par la demande accrue de durabilité.
L’année dernière, l’ISO a lancé la première de ses normes pour des produits durables, axée sur les carreaux de céramique. Son comité chargé de l’économie circulaire est particulièrement actif dans le soutien à la transformation d’économies entières en vue d’adopter ce modèle plus durable de production et de consommation. À mesure que les envies et les exigences des consommateurs changent, les normes devront s’adapter à l’évolution des modes de consommation ainsi qu’à la recherche d’une plus grande durabilité. Après tout, la circularité est en passe de s’imposer comme la nouvelle normalité.
À propos de l’autrice
Kate Harris est membre de l’ISO/TC 207/SC 3, au sein duquel elle anime le groupe d’étude sur la stratégie de communication et de promotion en matière d’étiquetage environnemental.